lundi 27 avril 2015

DES RESTRICTIONS LIMITEES AU PRINCIPE DE PERSONNALISATION DES PEINES dans droit français

DES RESTRICTIONS LIMITEES AU PRINCIPE DE PERSONNALISATION DES PEINES

Les "limites posées par la loi" à la personnalisation des peines, au sens de l'article 132-24 CP, restent assez peu contraignantes, tant qu'elle n'est pas assortie d'une mesure de sûreté, obstacle qui doit là aussi être relativisé.

II/I/ DES LIMITES A LA LIBERTE DU JUGE ASSEZ PEU CONTRAIGNANTES

A/ Limites liées à certaines peines
La grande liberté du juge pour choisir les peines et les combiner n'est pas sans limite, du fait déjà du maintien du caractère obligatoire de la confiscation qui est aussi une mesure de sûreté et de l'interdiction de séjour, qui est plus une conséquence de l'inexécution de la condamnation qu'une peine automatique.
A/I/ Restrictions dans le choix de certaines peines
La liberté du juge, sans être remise en cause, peut être contrariée par l'obligation de motiver toute peine d'emprisonnement ferme, sauf en cas de récidive [article 132-19 CP] pour autant qu'elle ne soit pas inférieure aux peines planchers instaurée par la loi du 10 août 2007 [art. 132-19-1 CP], ou avec sursis si elle vise un mineur.
De même, si l'article 131-11 CP permet en cas de "délit…puni d'une ou plusieurs peines complémentaires", de les prononcer à titre principal, a contrario cette faculté est exclue pour les crimes.
Si le juge peut prononcer plusieurs peines encourues, l'éventail des combinaison offert n'est pas infini.
Une peine alternative ne se cumuler avec celle qu'elle remplace, sauf à perdre son caractère alternatif, comme la peine de jours-amende cumulable avec une peine d'emprisonnement ou celle de sanction réparation.
Il n'est pas plus possible de cumuler plusieurs peines alternatives à la place de celle qu'elles remplacent.
Enfin, certains rejets découlent d'incompatibilités [ex: les peines de suspension et d'annulation du permis de conduire] ou d'impossibilité de cumuler la même peine à la fois à titre alternatif et complémentaire.
A/II/ Restrictions dans la détermination du quantum
La marge de manœuvre du juge dans la fixation du quantum des peines dépend des règles de cumul.
Les peines se cumulent à concurrence des peines les plus fortes, à l'exception des amende contraventionnelles qui se cumulent entre elles et avec celles encourues ou prononcées pour des crimes ou délits en concours.
Si l'absence de tout seuil minimum permet de fixer la peine par référence au seul maximum encouru, la règle n'est pas absolue du fait du maintien ponctuel d'un système de peines-plancher toutefois peu contraignant.
En effet, les peines minimales instaurées par la loi du 10 août 2007 en cas de récidive ne lient pas le juge.
Quant aux minimums maintenus en matière criminelle, il s'agit d'un emprisonnement de 2 ou 1 an, selon que la peine encourue est une peine de réclusion ou de détention à perpétuité ou à temps [art. 132-18 CP].
Si la peine prononcée est une peine de réclusion ou de détention criminelle elle doit être supérieure à 10 ans.

B/ Limites liées à la situation du délinquant
B/I/ Restrictions quant aux règles applicables aux mineurs et aux personnes morales
Le principe de la personnalisation des peines s'applique à toute personne, selon les peines applicables.
Pour les personnes morales, il faut exclure les modes de personnalisation basés sur un système probatoire et ceux liés aux peines ou motifs propres aux personnes physiques [peines privatives de liberté, motif familial…] et ne retenir la distinction entre peine principale, alternative et complémentaire qu'en matière contraventionnelle.
S'agissant des mineurs, les modes de personnalisation des peines prévus pour les majeurs leur sont applicables et ceux qui ne le sont ont une qu'une portée réelle limitée, ce qui amène à relativiser ces restrictions.
L'exclusion de l'ajournement avec injonction est à rapprocher de son inutilisation relative.
Si l'ajournement avec mise à l'épreuve est inapplicable à un mineur, il peut être remplacé, selon les perspectives d'évolution de sa personnalité, par un ajournement simple assorti d'une mesure de liberté surveillée.
Quant au sursis avec mise à l'épreuve, des mesures éducatives ne sont pas sans rappeler certaines obligations.
Enfin, l'abaissement à 210H00 de la durée du travail d'intérêt général [loi du 9 mars 2004], déjà unifiée entre les majeurs et les mineurs, conduit à tempérer pour ces derniers l'exclusion du sursis assorti d'une telle obligation.
B/II/ Restrictions liées au passé pénal des délinquants
Tout en étendant l'application du sursis simple, l'article 132-31 CP est plus exigeant quant aux antécédents.
Il ne peut être ordonné à l'égard d'une personne physique, en matière criminelle, correctionnelle [art. 132-30 CP] ou contraventionnelle [art. 132-33 CP], que si le prévenu qu'a pas été condamné dans les cinq ans précédant les faits, pour crime ou délit de droit commun à de la réclusion ou de l'emprisonnement [art. 132-31 CP].
Il ne peut être ordonné que pour l'emprisonnement, en cas de condamnation à une peine non privative de liberté.
En matière criminelle ou correctionnelle, la même exclusion touche les personnes morales condamnées dans le même délai pour un crime ou délit de droit commun à une amende de plus de 60.000 € [article 132-31 al. 2 CP].
En matière contraventionnelle, il suffit d'une condamnation dans le même délai à plus de 15.000 € d'amende.
S'agissant du sursis avec mise à l'épreuve, la loi du 12 décembre 2005 en a supprimé l'octroi à l’auteur d’un délit ayant déjà fait l'objet de deux condamnations assorties de ce sursis pour délits identiques ou assimilés.
En cas de faits graves [un crime ou un délit de violences volontaires, agressions ou atteintes sexuelles ou tout délit aggravé par des violences], l'octroi du sursis avec mise à l'épreuve est écarté pour le récidiviste ayant fait l'objet d'une condamnation pour les mêmes faits ou des faits assimilés, assortie du sursis avec mise à l'épreuve.
Si le bénéfice de ce sursis reste possible même pour un multi récidiviste, sa durée maximale a été portée de 3 ans à 5 ans en cas de récidive légale et même jusqu'à 7 ans pour un multi récidiviste [article 132-42 CPP].

II/II/ DES LIMITES CONSECUTIVES A UNE PERIODE DE SURETE
La période de sûreté exclut une suspension ou un fractionnement de peine, un placement à l'extérieur, une permission de sortir, une semi-liberté et une libération conditionnelle [art. 132-23 CP], sans être automatique.
Au-delà de cette limite liée au domaine de la période de sûreté, une autre tient à son expiration anticipée.

A/ Le domaine d'application contenu des période de sûreté
La période de sûreté n'est déjà pas applicable aux mineurs [art. 20-2 al. 3 ordonnance du 2 février 1945].
S'agissant des majeurs, la période de sûreté n'est de plein droit qu'en cas de condamnations à une peine privative de liberté ferme d'une durée d'au moins 10 ans pour des infractions spécialement prévues par la loi.
Faute de disposition légale [ex: le meurtre], une peine privative de liberté ferme de plus de 5 ans, peut comporter une période de sûreté facultative limitée aux 2/3 de la peine ou à 22 ans en cas de réclusion perpétuelle.
Cette dernière hypothèse reste théorique puisque depuis la réforme du code pénal, dès que la réclusion criminelle perpétuelle est encourue, le législateur a également prévu une période de sûreté de plein droit.

B/ L'expiration anticipée de la période de sûreté
Si la période de sûreté n'est pas concernée par des réductions de peine accordée par le juge d'application des peines qui s'imputent sur la durée excédant cette peine, elle peut par contre être révisée et s'achever plus tôt.
Le juge de l'application des peines peut exceptionnellement, si "le condamné présente des gages sérieux de réadaptation sociale", saisir la juridiction de jugement du lieu de détention de même degré que celle ayant prononcé la condamnation pour mettre fin à la période de sûreté ou pour en réduire la durée [article 720-4 CPP].
Même si l'expiration anticipée de la période de sûreté ne conduit pas à la libération du condamné, elle va lui permettre de bénéficier de mesures de personnalisation des peines qui lui étaient auparavant refusées.

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