DES RESTRICTIONS LIMITEES AU
PRINCIPE DE PERSONNALISATION DES PEINES
Les "limites posées par la loi" à la personnalisation
des peines, au sens de l'article 132-24 CP, restent assez peu
contraignantes, tant qu'elle n'est pas assortie d'une mesure de sûreté, obstacle qui doit là aussi être relativisé.
II/I/ DES LIMITES A LA
LIBERTE DU JUGE ASSEZ PEU CONTRAIGNANTES
A/ Limites liées à
certaines peines
La grande liberté du
juge pour choisir les peines et les combiner n'est pas sans limite, du fait
déjà du maintien du caractère obligatoire de la confiscation qui est
aussi une mesure de sûreté et de l'interdiction de séjour, qui est plus
une conséquence de l'inexécution de la condamnation qu'une peine automatique.
A/I/
Restrictions dans le choix de certaines peines
La liberté du juge, sans
être remise en cause, peut être contrariée par l'obligation de motiver toute
peine d'emprisonnement ferme, sauf en cas de récidive [article 132-19 CP] pour
autant qu'elle ne soit pas inférieure aux peines planchers instaurée par la loi du 10 août 2007 [art. 132-19-1 CP], ou avec sursis si elle vise un
mineur.
De même, si l'article 131-11 CP permet en cas de "délit…puni d'une ou plusieurs peines complémentaires", de les prononcer
à titre principal, a contrario cette faculté est exclue pour les crimes.
Si le juge peut
prononcer plusieurs peines encourues, l'éventail des combinaison offert n'est
pas infini.
Une peine alternative ne se cumuler avec celle
qu'elle remplace, sauf à perdre son caractère alternatif, comme la peine de jours-amende
cumulable avec une peine d'emprisonnement ou celle de sanction réparation.
Il n'est pas plus possible de cumuler
plusieurs peines alternatives à la place de celle qu'elles remplacent.
Enfin, certains rejets découlent
d'incompatibilités [ex: les peines de suspension et d'annulation
du permis de conduire] ou d'impossibilité de cumuler la même peine à la fois à
titre alternatif et complémentaire.
A/II/
Restrictions dans la détermination du quantum
La marge de manœuvre du
juge dans la fixation du quantum des peines dépend des règles de cumul.
Les peines se cumulent à concurrence des peines les plus fortes, à l'exception des amende
contraventionnelles qui se cumulent entre elles et avec celles encourues ou prononcées pour
des crimes ou délits en concours.
Si l'absence de tout
seuil minimum permet de fixer la peine par référence au seul maximum encouru,
la règle n'est pas absolue du
fait du maintien ponctuel d'un système de peines-plancher toutefois peu
contraignant.
En effet, les peines minimales instaurées par la loi du 10
août 2007 en cas de récidive ne
lient pas le juge.
Quant aux minimums maintenus en matière
criminelle, il s'agit d'un emprisonnement de 2 ou 1 an, selon que la peine
encourue est une peine de réclusion ou de détention à perpétuité ou à temps
[art. 132-18 CP].
Si la peine prononcée est une peine de
réclusion ou de détention criminelle elle doit être supérieure à 10 ans.
B/ Limites liées à la
situation du délinquant
B/I/
Restrictions quant aux règles applicables aux mineurs et aux personnes
morales
Le principe de la
personnalisation des peines s'applique à toute personne, selon les peines applicables.
Pour les personnes
morales, il faut exclure les modes de personnalisation basés sur un système probatoire et ceux liés aux peines ou
motifs propres aux personnes physiques [peines privatives de liberté, motif
familial…] et ne
retenir la distinction entre peine principale, alternative et complémentaire
qu'en matière contraventionnelle.
S'agissant des mineurs,
les modes de personnalisation des peines prévus pour les majeurs leur sont
applicables et ceux qui ne le sont ont une qu'une portée réelle limitée, ce qui amène à relativiser ces restrictions.
L'exclusion de l'ajournement avec
injonction est à rapprocher de son inutilisation relative.
Si l'ajournement avec mise à l'épreuve
est inapplicable à un mineur, il peut être remplacé, selon les perspectives d'évolution de sa
personnalité, par
un ajournement simple assorti d'une mesure de liberté surveillée.
Quant au sursis avec mise à l'épreuve,
des mesures éducatives ne sont pas sans rappeler certaines obligations.
Enfin, l'abaissement à 210H00 de la durée du
travail d'intérêt général [loi du 9
mars 2004], déjà unifiée entre les
majeurs
et les mineurs, conduit à tempérer pour ces derniers l'exclusion du sursis assorti d'une telle
obligation.
B/II/
Restrictions liées au passé pénal des délinquants
Tout en étendant l'application du sursis
simple, l'article 132-31 CP est plus exigeant quant aux antécédents.
Il ne peut être ordonné à l'égard d'une
personne physique, en matière
criminelle, correctionnelle [art. 132-30 CP] ou contraventionnelle [art. 132-33
CP], que si le prévenu qu'a pas été condamné dans les cinq ans précédant
les faits, pour crime ou délit de droit commun à de la réclusion ou de
l'emprisonnement [art. 132-31 CP].
Il ne peut être ordonné que pour l'emprisonnement, en cas de condamnation à une peine non privative
de liberté.
En matière criminelle ou
correctionnelle, la même exclusion touche les personnes morales condamnées dans
le même délai pour un crime ou délit de droit commun à une amende de plus de
60.000 € [article 132-31 al. 2 CP].
En matière
contraventionnelle, il suffit d'une condamnation dans le même délai à plus de
15.000 € d'amende.
S'agissant du sursis
avec mise à l'épreuve, la loi du 12 décembre 2005 en a supprimé l'octroi à l’auteur d’un délit ayant déjà fait l'objet de deux condamnations
assorties de ce sursis pour délits identiques ou assimilés.
En cas de faits graves
[un crime ou un délit de violences volontaires, agressions ou atteintes
sexuelles ou tout délit aggravé par des violences], l'octroi du sursis
avec mise à l'épreuve est écarté pour le récidiviste ayant fait l'objet d'une
condamnation pour les mêmes faits ou des faits assimilés, assortie du sursis
avec mise à l'épreuve.
Si le bénéfice de ce
sursis reste possible même pour un multi récidiviste, sa durée maximale a été
portée de 3 ans à 5 ans en cas de
récidive légale et même jusqu'à 7 ans pour un multi récidiviste [article 132-42
CPP].
II/II/ DES LIMITES
CONSECUTIVES A UNE PERIODE DE SURETE
La période
de sûreté exclut une suspension ou un fractionnement de peine, un placement
à l'extérieur, une permission
de sortir, une semi-liberté et une libération conditionnelle [art. 132-23 CP], sans être automatique.
Au-delà de cette limite
liée au domaine de la période de sûreté, une autre tient à son expiration
anticipée.
A/ Le domaine
d'application contenu des période de sûreté
La période de sûreté
n'est déjà pas applicable aux mineurs [art. 20-2 al. 3 ordonnance du 2 février
1945].
S'agissant des majeurs,
la période de sûreté n'est de plein droit qu'en cas de condamnations à une peine
privative de liberté ferme d'une durée d'au moins 10 ans pour des infractions
spécialement prévues par la loi.
Faute de disposition
légale [ex: le meurtre], une peine privative
de liberté ferme de plus de 5 ans, peut comporter une période de sûreté facultative limitée aux 2/3 de la peine
ou à 22 ans en cas de réclusion perpétuelle.
Cette dernière hypothèse
reste théorique puisque depuis la réforme du code pénal, dès que la réclusion
criminelle perpétuelle est encourue, le législateur a également prévu une
période de sûreté de plein droit.
B/ L'expiration anticipée
de la période de sûreté
Si la période de sûreté n'est pas concernée
par des réductions de peine accordée par le juge d'application des peines qui s'imputent sur la durée
excédant cette peine, elle peut par contre être révisée et s'achever plus tôt.
Le juge de l'application des peines peut
exceptionnellement, si "le
condamné présente des gages sérieux
de réadaptation sociale", saisir la juridiction de jugement du lieu
de détention de même degré que celle ayant prononcé la condamnation pour mettre
fin à la période de sûreté ou
pour en réduire la durée [article 720-4 CPP].
Même si l'expiration anticipée de la période de sûreté ne conduit pas à la
libération du condamné, elle va lui permettre de bénéficier de mesures de
personnalisation des peines qui lui étaient auparavant refusées.
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