Généralités
1. La notion
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1.1. La définition et ses éléments
Définition : intérêt (a) considérable (b) qui touche un grand nombre d’administrés (c) et que
ceux-ci ne veulent pas ou ne peuvent pas satisfaire par leurs propres moyens (d).
Caractéristiques :
- c’est principe constitutionnel (art.5 al.2 Cst)
- intérêt public et qualité pour agir : l’intérêt public officiait avant surtout comme gardefou
de l’Etat. Il faut bien le distinguer de l’intérêt de fait avec lequel il y a qualité pour
agir. On a intérêt de fait quand on a qualité pour agir.
Eléments de la définition
a) intérêt : biens de police et autres
b) considérable : qualificatif, pas quantitatif. Est considérable ce qui est suffisamment
important pour motiver objectivement l’intervention de l’autorité publique.
c) grand nombre d’administrés : collectivité. Il n’est pas nécessaire que la majorité des
administrés soient touchés. On entend par là un grand nombre. Grand nombre signifie
ici, la collectivité dans son ensemble. Si on disait la majorité, il y aurait un gros
problème pour les étrangers, les handicapés,… on ne leur accorderait rien. Tandis que
là, on regarde par rapport à la collectivité (par ex. la collectivité des aveugles,…)
d) subsidiarité : par rapport aux administrés. L’Etat prend en charge, intervient que si
l’action des administrés n’est pas suffisante. Mais l’intérêt fiscal de l’Etat ne suffit
jamais.
Distinctions :
- intérêt public et marché public
marché public : contrat de droit administratif entre l’Etat et l’administré.
- intérêt public et tâche publique
tâche publique : ensemble des devoirs confiés par le législateur à l’Etat (buts
nécessaires pour atteindre l’intérêt public). L’utilité publique ne relève pas de l’Etat.
Public :
o implique un intérêt public mais c’est un devoir, pas un intérêt.
o par le législateur : droit public mais c’est un devoir, pas un intérêt.
Entre le marché public et la tâche publique, le lien est direct. Le marché public est un contrat.
La tâche publique est un objet de contrat.
Une tâche publique recouvre toujours un intérêt public tandis qu’un intérêt public n’est que
rarement une tâche publique.
Intérêt public et marché public : il n’y pas de lien direct. C’est la tâche publique qui est
l’intermédiaire.
Utilité publique : lorsque les organismes privés font une action particulière au niveau public.
L’utilité publique se distingue de la tâche publique par son origine. Elle vient d’une décision
tandis que la tâche publique provient d’une loi. Attention, il n’y a pas toujours une question
d’intérêt public dans l’utilité publique.
L’utilité publique est faite par un particulier tandis que la tâche publique est faite par l’Etat.
Ex : un théâtre qui ne joue qu’en romanche.
C’est d’utilité publique de faire survivre cette langue et d’apporter de la culture. Mais ce n’est
pas une tâche publique car ce geste est fait par un particulier et pas par l’Etat.
1.2. La difficulté d'une description générale
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Notion :
- l’intérêt public est une notion juridique indéterminée
=> latitude de jugement : le juge s’en tiendra souvent à ce qu’a décidé
l’autorité de 1ère instance. Une grande partie de l’intérêt public a déjà
été vue avec l’autorité de 1ère instance. Souvent d’ailleurs il sera dit :
« l’autorité de 1ère instance est plus à même de statuer sur la décision »
- casuistique de la doctrine
- conséquence procédurale
1.3. L'évolution dans le temps et dans l'espace
Notion :
- beaucoup de nouveau intérêts publics
=> multiplication des conflits (plus on a d’intérêts publics, plus on a de
conflits)
- instabilité de la procédure et intérêt public
=> motif de l’instabilité : révocation
- conditions du respect de l’intérêt public : application correcte de la loi (nouvelle
interprétation de la loi ou nouvelle loi que l’on estime plus correcte) et concrétisation
nuancée de l’intérêt public
Attention il faut distinguer entre la force de chose décidée et l’autorité de chose jugée.
La force de choses décidée est formelle, la décision une fois rendue n’est plus susceptible de
recours.
L’autorité de choses jugée est matérielle et peut être révoquée.
ATF 106 Ia 267 (Peep show, p.79, polycopié) :
L’intérêt public évolue et n’est pas le même sur tout le territoire suisse. Cet ATF se fonde sur
l’intérêt public qu’il concrétise (consid. 3b). On prend le critère d’une personne normale :
pour le citoyen lambda st-gallois, ça le gène que la femme soit considérée comme un objet.
p.156 : à la fin de l’ATF, le TF donne le détail de l’intérêt public.
Aujourd’hui, sûrement que l’on accorderait une autorisation avec des conditions mais en tout
cas pas de refus catégorique. Aujourd’hui, on prend plus en compte la protection des
travailleurs du sexe.
2. Intérêt public et intérêt fiscal
Les intérêts privés ne recouvrent pas que ceux des particuliers. L’Etat aussi peut avoir un
intérêt privé. L’intérêt privé de l’Etat c’est son intérêt fiscal.
Défintion : intérêt de l’Etat à augmenter ses recettes et/ou réduire ses dépenses.
Normalement, on retiendra un intérêt fiscal dans des cas limités, dans des situations crasses.
On retient plus facilement l’intérêt public. En doctrine, il y a une controverse : certains
auteurs estiment que l’intérêt fiscal est un intérêt public. Le TF est contre cet avis.
Exemples de cas limites :
Expropriation et refus de l’Etat de mettre en place une infrastructure.
Dans ce cas, il n’est souvent pas facile de distinguer entre l’intérêt fiscal et l’intérêt public.
Souvent c’est sur un terrain privé que se passera l’expropriation car c’est plus simple
d’exproprier le propriétaire. Souvent, on préfère également donner à un particulier
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l’exploitation de ce terrain. Ici, l’intérêt fiscal ne suffit pas donc on confie l’exploitation à un
particulier.
Refus de l’Etat de mettre en place une infrastructure. L’Etat dira : je n’ai pas d’intérêt fiscal
(ce qui est plus ou moins valable). Ce qui comptera davantage c’est que l’infrastructure que
l’on demande réponde à un intérêt public.
3. Les conflits d'intérêts
3.1. Intérêts publics et privés (des particuliers)
- l’intérêt public n’est pas forcément prépondérant
o mise en balance ou pondération « pesée »
o principe de coordination en droit de l’environnement
coordination matérielle : tous les intérêts publics doivent être pris en
compte par une organisation faîtière
coordination formelle : organiser la procédure avec le préavis des
services. L’autorité ne peut pondérer que lorsqu’elle a eu tous les
préavis.
- tenir compte de l’intérêt privé des particuliers
Ex : construction d’un parking :
☺ : améliorer le trafic, meilleur marché pour les places de parc (plus il y a de places, plus les
tarifs vont baisser)
: on ne veut pas perdre de place pour l’habitat, le promoteur devrait avoir le pouvoir d’user
de son bien comme il l’entend
Ex 2 : ouverture des magasins le soir :
Intérêt public : tranquillité des voisins
Intérêt privé : pour le manager des magasins, il pourrait faire plus de profits, avoir une
clientèle plus large.
ATF 117 Ia 302 p.84 : consid. 4b et 4c.
Consid. 4b : élément à prendre en compte dans l’aménagement du territoire. L’intérêt privé de
l’agriculteur en espèce (il en allait de la pérennité de son exploitation) est supérieur à l’intérêt
public (l’intérêt public réel n’est pas suffisant).
3.2. Plusieurs intérêts publics
Conflits dans les marchés publics :« mieux-disant » ou soumissionnaires locaux. Pour choisir,
il y a deux principes :
- mieux disant : rapport qualité-prix
- soumissionnaires locaux : souvent plus chers et c’est pour ça qu’on doit les pondérer.
Conflits dans d’autres domaines : ex : ATF 105 IA 91 Plüss p.87 : tranquillité contre libre
expression d’opinion politique. On doit prendre en compte des critères objectifs (l’importance
de la manifestation dans le débat doit être prise en compte)
n.b : l’administré peut invoquer l’intérêt public
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